Sobriété et gestion des emplois : choisir pour ne pas subir

Nous avons vu dans les fiches 1 et 2 que l’aviation cherche de nombreuses solutions techniques aux problèmes posées par l’augmentation des émissions auquel le secteur contribue grandement. Cependant face à l’inefficacité de ces solutions technologiques l’aviation semble face à un dilemme : Changer ou disparaitre.

Quel avenir pour le secteur de l’aviation ?

Entre ambition et réalité : l’heure du constat et du bilan

Le secteur aérien a un rôle important à jouer pour parvenir à respecter les objectifs de réduction des émissions (Voir Fiche n°1 Aérien). De nombreuses solutions techniques sont ainsi envisagées pour réduire les émissions du secteur (Voir Fiche n°2 Aérien)

Cependant, malgré toutes les hypothèses optimistes que l’on peut faire, ces mesures ont seulement 16% de chances de réduire les émissions du secteur suffisamment pour qu’il s’inscrive dans la trajectoire des +2°C en 2100. Il est donc nécessaire d’accompagner le secteur de l’aviation dans sa transition, afin d’éviter que ce changement ne soit subi de manière beaucoup plus brutale plus tard, si nous nous retrouvons dos au mur.

La sobriété

Un certain nombre de processus peuvent être mis en place pour réduire les usages de l’avion que nous avons : Taxe carbone, Limitation des voyages d’affaire, Repenser le système de miles…

Les pistes, nombreuses, se répartissent en trois grandes catégories :

Le premier objectif essentiel est d’informer largement. Il est important que chacun puisse juger objectivement des enjeux qui rentrent en compte dans un trajet. Une proposition faite par le Shift Project est d’afficher sur tous les supports de l’aviation l’impact climatique du voyage.

Il s’agira ensuite de mener une double politique à la fois d’incitation à la réduction en encourageant les alternatives et à la fois de contrainte en réglementant l’usage de l’avion pour limiter les vols.

Les mécanismes de contraintes peuvent passer par plusieurs systèmes :

1) Des interventions des compagnies aériennes elles-mêmes

Elles peuvent repenser le système de miles qui, à l’heure actuelle, est un puissant incitateur au voyage ou même simplement augmenter le prix des billets pour refléter les externalités négatives engendrées par un vol.

2) Par des réglementations des gouvernements, européen ou mondial

Un certain nombre de réflexions sont actuellement étudiées comme la très débattue taxe carbone. Le défaut de cette taxe ou d’augmenter le prix des billets est que ceci risque de limiter les déplacements uniquement pour les personnes à revenus moyens, qui utilisent l’avion de manière relativement exceptionnel. C’est pourquoi le Committe on Climate Change (l’équivalent de la Convention citoyenne au Royaume-Uni1) propose une autre option des taxes nommées FFL – Frequent Flyer Levy – et ALM – Air Mil Levy – qui consisteraient en une sorte de forfait vol sur une certaine période. La taxe serait donc proportionnelle au nombre de vols déjà faits. Cette idée permettrait d’avoir un impact beaucoup plus important sur les personnes plus aisées prenant le plus l’avion et pourrait également inciter les entreprises à limiter le nombre 

3) Réétudier les mécanismes de subventions de l’aéronautique

Cependant ce changement ne peut pas se faire uniquement par la contrainte. Il faut également pouvoir valoriser les alternatives afin que ne pas prendre l’avion ne soit pas synonyme d’une privation mais au contraire comme un acte positif et libre, moteur d’un nouveau monde. Cela peut passer par :

  • Une valorisation du télétravail
  • Une gestion plus flexible des congés
  • La valorisation de modes de transports alternatifs et décarbonés
  • Une réflexion sur nos offres de loisirs pour que le lointain exotisme ne soit pas la seule possibilité de faire rêver.

On pourrait également envisager le voyage comme loisir en lui-même et non plus seulement comme l’étape intermédiaire entre le travail et le loisir. L’avion perdrait alors de son intérêt au profit d’autres modes de transports : marche, vélo, bateau, les alternatives sont nombreuses !

La gestion des emplois

Nous l’avons vu, réduire le secteur de l’aérien est une nécessité. Cependant en France, l’industrie aérienne représente 350 000 emplois et le transport aérien 85 000. Or si des opportunités peuvent se présenter dans les prochaines décennies pour renouveler les flottes ou développer de nouvelles technologies, à long terme il sera impossible de conserver tous ces emplois. Il s’agit donc d’envisager à ne pas renouveler certains emplois après le départ à la retraite ou à proposer des reconversions professionnelles pour le personnel.

Il nous semble que la crise que traverse aujourd’hui le secteur aérien du fait de la pandémie de Covid-19 est l’occasion de lancer cette trajectoire de conversion. Le secteur aérien a en effet été très durement touché par cette crise et fait face à une crise sans précédent. Pourquoi donc ne pas profiter de cette opportunité pour convertir ce secteur au lieu de reconstruire à l’identique quelque chose que nous devrons changer dans quelques années ?Les personnes travaillant pour l’aéronautique sont souvent des personnes qualifiées, que ce soient dans l’industrie ou même les agents travaillant dans les compagnies aériennes ou les aéroports qui pourraient facilement se reconvertir dans d’autres moyens de transport car leurs connaissances sont précieuses dans de nombreux domaines. En France par exemple, le savoir-faire d’Air France en termes de voyage, service au passager ou performance industrielle pourrait être un véritable atout dans une reconversion.

Conclusion

Au vu des résultats techniques, la route pour sauver l’aviation, ce rêve d’Icare de l’humanité est longue et ardue. Cependant nous sommes persuadés qu’avec l’implication de chacun, il est possible de ne pas abandonner cette technologie que nous avons mis si longtemps à développer.

Sources :

  1. https://www.theccc.org.uk

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